Disclaimer: Les personnages ne sont pas de moi, à part Antoine et Clara.
Chapitre 6: Le regard du mensonge
« Le silence cache parfois des mensonges, mais elle cache aussi les vérités les plus sombres. »
Une sonnerie de téléphone retentit dans le silence imposant de la cave. À quelques mètres du corps inerte un écran s'illumina dans la pièce froide et sombre. Une nouvelle fois, la même sonnerie retentit, ce qui réveilla difficilement le jeune homme. Ses paupières à peine levées, qu'un mal de crâne lui vint subitement, lui obligeant à fermer les yeux. Il les rouvrit plus doucement, tandis qu'il essaya de comprendre ce qui se passait. Peu à peu ses yeux s'habituèrent à la faible noirceur puis il tendit son bras vers son téléphone mobile, qui affichait toujours le nom de l'appelant. Malgré ses efforts, il n'arrivait pas à l'atteindre. Le corps complètement engourdi et endolori, Sacha ne bougea plus. Il avait soudainement froid dans cette pièce non réchauffée. Il humecta ses lèvres alors qu'il essaya de se lever mais en vain. Il avait trop mal. Sa chemise à moitié déboutonnée, Sacha risqua de toucher son épaule. A peine l'avait-il frôlé qu'il retira sa main. Douloureux. Le mot était trop faible. Il se remémora le souvenir tout récent : Antoine avait carrément mordu l'épaule où se trouvait le suçon. A cet instant, le jeune homme avait compris les derniers mots de son beau-père, comme quoi il lui appartenait. Il n'acceptait simplement pas que Sacha puisse vivre sa vie sans lui. Il avait voulu le nuire encore plus, le salir, le souillé jusqu'au sang. Il avait voulu mettre son empreinte pour s'assurer qu'il n’appartenait bel et bien comme il l'avait pensé. C'était une sorte de preuve que Sacha sera toujours lié à lui. Et cette preuve c'était cette morsure affreuse qui couvrait le suçon de son épaule. Antoine l'avait mordillé, il avait joué avec. La peur coulait dans ses veines, l'impuissance lui collait à sa peau, la honte dansait dans ses yeux. Sacha craqua en silence.
Quelques larmes roulèrent sur ses joues, lorsqu'il revit encore l'image de son beau-père lui murmurer qu'il n'était qu'à lui et à personne d'autre. Jamais Sacha n'avait eu aussi peur de cet homme qui l'avait malgré lui considéré pendant longtemps comme une présence partielle de l'absence de son père biologie.
De nouveau, la sonnerie retentit dans le silence pesant, alors que Sacha sanglota de plus en plus fort.
OOoOOoOO
La petite cloche se bascula lorsque la porte s'ouvrit, laissant retentir un petit son aiguë, signe qu'un client venait de rentrer dans la boulangerie.
« Bonjour madame Ketchum! »
Une femme d'un âge mûr, lui sourit gaiement tout en remettant correctement son tablier blanc. Délia lui rendit un sourire un peu crispé.
« Bonjour. On va prendre des pâtisseries.»
« Des éclairs! »
Les deux femmes baissèrent leurs regards vers la petite Clara, puis Délia acquiesça à sa demande.
« Deux éclairs s'il vous plaît. Un au chocolat et un autre au café. »
La boulangère acquiesça puis s'activa pour prendre les derniers éclairs qui avaient en vitrine afin de les emballer dans une belle petite boîte cartonnée. Après que la boulangère ait rendu la monnaie, Délia prit le paquet tout en serrant la main de sa fille afin de sortir de la petite boulangerie tout en laissant s'échapper un « au revoir » de sa bouche à peine entre-ouverte. Les rayons du soleil commençaient peu à peu à être faibles. Délia jeta un coup de d'œil rapide à sa montre et s'aperçut qu'il était presque dix-huit heures. Elle ne savait plus quoi faire. Elle n'osait pas rentrer chez elle depuis la récente révélation. Elle se maudissait d'avoir encore des doutes sur ce que son fils lui avait dit. Et si c'était vraiment le cas, est-ce possible qu'Antoine ait pu profiter de Sacha étant petit ? Non. Impossible. C'était tout bonnement inimaginable. Rien d'y penser, Délia se trouvait mauvaise mère. Elle jeta un regard tendre à sa fille qui avait le sourire aux lèvres, à l'idée de manger les pâtisseries au dîner. Il fallait à tout prix qu'elle aille parler à Sacha afin de mettre les choses au clair et le plus rapidement possible. Elle accéléra un peu le pas alors que Clara essaya de suivre son rythme le mieux qu'elle pouvait.
Alors qu'elles s'approchèrent peu à peu du pavillon, Délia ne pouvait s'empêcher de ramener plus sa fille près d'elle, comme si elle devait la protéger de cette maison qui semblait soudainement mystérieuse. Que cachait-elle entre ses murs? Sous ce toit? Que pouvait-elle abriter ? Des mystères, des illusions, de la crainte... Elle se sentait subitement impuissante face à cette demeure. Délia était de nouveau perdue dans ses pensées. Alors qu'elle s'approcha de la maison, elle remarqua que la voiture n'était plus devant le portail. Elle jeta un autre coup d’œil à sa montre, qui affichait dix-huit heures et sept minutes, puis elle se rappela qu'Antoine devait assuré son cours de karaté à ses élèves dans le gymnase de la ville d'à côté. Un frisson lui parcourut lorsqu'elle s’aperçut qu'elle avait laissé son fils seul avec lui. Sur le moment, elle n'avait qu’une idée en tête, c'était d'éloigner Clara de son père, mais Sacha? Elle se dirigea vers la porte d'entrée, une boule d'angoisse dans le ventre. Au moins Antoine n'était pas à la maison se rassura-t-elle.
« Tiens le paquet s'il te plaît ma chérie. »
Clara obéit sa mère tout en souriant. La main toujours serrée dans celle de sa fille, Délia dirigea son autre main vers le poignet de la porte pour découvrir qu'elle n'était pas verrouillée. Antoine n'avait pas pris la peine de la fermer pensa-t-elle. Est-ce que Sacha était encore là ? Elle ouvrit délicatement la porte, alors que Clara partit en furie pour déposer la boîte cartonnée sur la table de la cuisine. Elle retira son manteau en vitesse tout en allant dans le salon afin d'allumer la télévision alors que Délia observa les lieux.
« Où est Sacha ? »
Délia déposa son manteau sur son le porte-manteau, puis répondit à sa fille qu'elle allait voir s'il n'était pas à l'étage.
Lorsqu'elle fut en haut, elle inspecta toutes les pièces mais en vain, il n'y avait aucune trace de la présence de son fils. Elle descendit les escaliers, en décidant de s'installer sur le canapé auprès de Clara quand son regard se figea sur la porte entre-ouverte de la cave. Alors qu'elle franchit les dernières marches, elle ne put s'empêcher de s'assurer que Clara allait bien. Elle passa
devant le canapé, puis s'avança vers sa fille. Tout en étant debout, elle passa sa main dans les cheveux lisses de la petite fille.
« Je reviens ma puce, je vais à la cave. Baisse un peu le son, c'est un peu fort là. »
Clara prit la télécommande afin de baisser le son alors que sa mère se dirigea vers la porte de la cave. Délia l'ouvrit de plus en plus, tout en ayant une mauvaise impression.
« Sacha ? »
Elle descendit les premières marches tout en déclenchant la lumière afin d'éclairer les escaliers qui menèrent au sous-sol. Alors qu'elle était vers les dernières marches, elle entendit un sanglot étouffé.
« Sacha ? T'es là ? »
Elle appuya sur le deuxième interrupteur, qui éclaira la pièce humide. Ses orbes bleus balayèrent la cave alors qu'elle mit la main à sa bouche, choquée par ce qu'elle voyait.
« Oh mon Dieu, Sacha ! »
Elle courut vers lui, alors que ce dernier essaya malgré la douleur à se relever.
« Non, ne bouge pas. J'appelle les secours. »
Elle prit le téléphone mobile qui était à terre, loin d'elle, puis composa le numéro des urgences.
« Allô ? J'ai mon fils qui est couvert de sang à son épaule ! Il est allongé à terre et n'arrive plus à bouger, venez vite ! »
Au bout du fil, une jeune femme essaya de calmer Délia. Cette dernière avait une voix angoissée, alors que quelques larmes roulèrent sur ses joues, en pensant que le seul coupable de cette affreuse blessure n'était que d'autre que son compagnon. La jeune femme lui posa quelques questions sur la situation.
« Je ne sais pas ce qui s'est passé. Je suis descendue dans la cave et je l'ai vu sur le sol. »
Délia serra la main de son fils, alors qu'elle le sentit se raidir à ce seul contact.
« Au 28 rue des Bois. Non, c'est un pavillon. »
La jeune femme, qui était au bout du fil, essaya de la rassurer, tout en lui disant qu'une ambulance allait bientôt emmener son fils à un établissement de santé afin de le soigner au plus vite.
« Merci. »
Après avoir raccroché, ses orbes bleus croisèrent ceux de son fils, qui celui-ci ne put s'empêcher de fuir son regard.
Elle essuya ses larmes tout en lui disant que les secours allaient bientôt arriver, et qu'il fallait qu'elle remonte pour les accueillir. Juste avant de se relever, elle lui fit un baiser maternel sur le front du brun. Elle remarqua qu'il se sentait oppressé par ce simple contact. Ne voulait-il pas qu'elle le rassure ? Est-ce qu'Antoine l'avait fait du mal au point d'avoir peur des contacts des autres ? Délia ne voulait plus de ses questions qui n'arrêtaient pas de tourmenter son esprit. Alors qu'elle venait de sortir de la cave, elle s'approcha de Clara, tout en la prenant dans ses bras.
« Eh mon cœur, des personnes vont venir à la maison, pour emmener Sacha à l'hôpital. »
« Sacha est là ? »
« Oui, il est à la cave. Il ne va pas bien, c'est pour cela qu'il doit aller à l'hôpital. Là on attend les messieurs qui viennent le chercher. »
Clara acquiesça alors que sa mère la déposa à terre. Cette dernière partit attendre devant sa porte les secours, alors que son angoisse n'était toujours pas partie.
Quelques instants plus tard, les sirènes d'ambulances retentirent au loin, ce qui rendit un sourire de soulagement à Délia, alors qu'elle vit peu à peu le camion de secours s'approcher de sa maison. L'ambulance arrivée, trois hommes vêtu de blanc et de rouge sortirent en vitesse du véhicule puis prirent le matériel nécessaire.
« Où est le blessé ? »
« Venez. »
Deux hommes suivirent Délia tandis que le troisième resta auprès du camion afin de réagir au moment du départ.
Délia montra la direction de la cave, et préféra rester avec Clara afin de la rassurer. La petite fille avait un regard paniqué.
« Ils vont le soigner, hein maman ? »
« Oui ma chérie. » Répondit-elle en la prenant dans ses bras tout en lui faisant un bisou.
Quelques instants plus tard, un des deux hommes remonta de la cave puis alla vers elles.
« Madame. Il nous faut des informations sur cette blessure. Comment cela s'est produit ? »
« Je...j'ai découvert mon fils comme ça. J'étais partie à la boulangerie avec ma fille et quand je suis revenue, je l'ai cherché dans toute la maison avant de le découvrir allongé au sous-sol.»
« La blessure semble grande et profonde. Il faudra qu'on l'emmène à la clinique sainte Marguerite. Avez-vous un véhicule pour y aller là-bas ? »
« Non. »
« Très bien. On vous emmènera avec nous dans notre ambulance. »
Délia toujours tenant sa fille dans ses bras acquiesça.
« Est-ce votre fils à des allergies ? »
« Non. »
« Prend-il un traitement ? »
« Pas que je sache. Il n'habite plus ici. »
« D'après une observation brève, mon collègue et moi avons déduit qu'il s'agirait d'une sorte de morsure ou de quelque chose de tranchante qui aurait causé la blessure à son épaule. Vous ne saurez pas ce que cela peut être ? »
Délia se figea à sa question. L'image d'Antoine revenait sans cesse dans sa tête.
« Madame ? »
Aucune réponse. Le jeune homme posa sa main sur son bras.
« Est-ce tout va bien ? Vous êtes toute blanche. »
« Euh...je… Euh. L'émotion je crois. »
« Assied-vous. »
Délia posa sa fille à terre puis elle contourna le canapé pour s’asseoir suivit du médecin des urgences.
Le coude sur sa jambe, la main sur le visage, Délia avait une envie de pleurer.
« Il faut que vous nous aidez. »
On sentait dans sa voix qu'elle avait l'air désespérée. L'homme avait compris dans cette phrase qu'elle lançait un appel au secours pour une chose plus grave encore...
« Qu'est-ce qui se passe ? Vous m’inquiétez. »
Délia tourna sa tête vers sa fille et la fixa pendant de longues secondes.
« Clara, va dans la cuisine, tu peux manger les éclairs. »
Les yeux illuminés, Clara parti en courant vers la cuisine en oubliant son angoisse et la présence des médecins.
Lorsque Délia était sûre que sa fille était attablée tout en dégustant les pâtisseries, elle retourna sa tête vers l'ambulancier en soupirant.
La pression était trop forte. Une larme roula sur sa joue, alors qu'elle décida de raconter ce qui s'était passé depuis la venue de son fils, quelques heures auparavant.
Lorsque Clara revint dans le salon, le ventre rempli par les deux pâtisseries qu'elle avait dévoré, Délia venait tout juste de finir de raconter l'histoire sous le regard choqué de l'ambulancier.
« Écoutez, à la clinique on pourra vous aidez. Il y a des psychologues qui peuvent vous aider à surmonter tout cela, et si vous le voulez bien sûr, un médecin pourra examiner votre fille. »
Elle acquiesça sans réussir à sortir un seul mot de sa bouche tellement elle avait encore du mal à croire à cette réalité.
« Maman, tu pleures ? »
Rapidement, Délia essuya ses larmes, puis essaya de rassurer Clara.
« Ce n'est rien ma chérie. Maman est juste fatiguée par cette journée. »
La petite fille monta sur les genoux de sa mère pour lui faire un câlin. Cette dernière lui rendit aussi tendrement que possible.
Le médecin ambulancier remercia Délia de lui avoir répondu à ses questions et de lui avoir céder sa confiance afin de raconter cette épouvantable histoire avant de redescendre au sous-sol pour rejoindre son collègue afin de l'aider.
Quelques instants plus tard, on entendit des pas qui résonnèrent dans les escaliers du sous-sol puis une voix grave retentit.
« Adrien, remonte ...encore un peu. Oui voilà, là c'est bon. On peut continuer à avancer. »
Délia ouvrit la porte complètement pour que les deux hommes puissent sortir de la cave tout en portant le brancard bien droit afin d'éviter d'empirer les douleurs du jeune homme. Ils traversèrent le salon puis sortirent du pavillon afin de mettre le blessé dans le véhicule tandis que le troisième homme se mit au volant tout en attachant sa ceinture.
Le fameux Adrien, aida Délia à monter dans le véhicule ainsi que sa fille.
« Mettez-vous au fond à côté de lui. »
Délia prit place sur le banc blanc avec Clara sur ses genoux. Cette dernière observa les médecins faire des gestes de soins sur son grand frère.
« Ils font quoi maman ? »
« Ils le soignent mon ange. »
Délia lui fit une bise sur la tête sous le regard admiratif d'Adrien, celui qui avait écouté son récit, celui qui avait malgré lui vu ses larmes de faiblesse.
L'ambulance arriva sous les bruits de ses sirènes à la fameuse clinique puis s'arrêta juste devant les portes automatiques.
« Aller les gars, on le fait descendre ! »
Le conducteur ainsi que le fameux Adrien sortirent le brancard ou était installé le blessé du véhicule et le firent passé aux médecins qui vinrent de sortir de l'établissement afin de le prendre en charge, alors que le troisième collègue leur expliqua la situation.
OoOooOoooO
«...je ne suis pas là pour le moment, laissez-moi un message et j'essayerai de vous contacter le plus rapidement possible. »
Sublime voix. Charmante voix. Foutu voix qui lui donnait envie de recomposer le numéro. La voix enregistrée de Sacha résonna dans la chambre, alors qu'Ondine pesta inutilement contre son téléphone portable.
« Mais bon sang ! A quoi ça sert un portable si ce n'est pas pour le porter sur soi ?! »
La rousse soupira. Elle s'insulta mentalement d'idiote en s'apercevant qu'elle parlait toute seule. Décidément il la rendait folle, complètement à bout. Peut-être avait-il un entretien d'embauche et qu'il ne fallait pas le déranger ? Ou bien qu'il l'avait mis en silencieux sans s'apercevoir ? C'est tout lui, pensa-t-elle, las.
Elle s'allongea sur le lit, ne sachant pas quoi faire. Le portable devant ses yeux, ses doigts bougèrent instinctivement, sans qu'elle ne puisse les arrêter.
Un bip sonore résonna suivit d'un autre, lorsqu'une voix retentit.
« Allô Ondine ? »
C'était une voix féminine.
Le téléphone mobile à l'oreille, Ondine semblait avoir déjà entendu cette voix.
« Euh...oui. Sacha est là ?»
« Ondine, c'est Délia. Je suis à la clinique sainte Marguerite. »
« Madame Ketchum !? Mais pourquoi êtes-vous à l’hôpital avec le portable de votre fils ? »
« C'est Sacha. Oh si tu savais Ondine, il s'est passé tellement de choses aujourd'hui... Les médecins sont en train de le soigner. »
« Je viens ! D'accord ? Je vous rejoins et vous allez me raconter ce qui s'est passé. Je... j'arrive. »
« D'accord. A toute à l'heure.»
Elle raccrocha puis se précipita chercher ses affaires, alors que son pied cogna le pied du lit, ce qui lui fit sortir un juron. Elle descendit les escaliers tout en ratant une marche causé par sa maladresse inquiétude qui lui faisait que déraper ses gestes.
« Eh merde où est ma clé de voiture ?! »
Tandis qu'elle cherchait sa clé dans ses poches de son manteau ainsi que de son pantalon, son inquiétude augmenta de plus en plus alors que son esprit était épris par la voix préoccupée de Délia. Elle fouilla dans tous les moindres recoins du salon alors que son téléphone fixe sonna, ce qui augmenta sa nervosité. Elle prit le combiné à son oreille à la va-vite alors que la voix de sa grande sœur retentit avec contentement.
« Écoute Daisy, je ne peux pas rester longtemps au téléphone, je dois immédiatement aller à la clinique Sainte Marguerite. »
Au bout du fil Daisy s'inquiéta, elle voulait plus d'informations mais Ondine ne semblait pas vouloir répondre à ses questions.
« T'es sur le chemin là ? »
Ondine soupira de soulagement en entendant sa sœur lui dire qu'elle était près de chez elle et qu'elle avait décidé d'aller à la clinique ensemble. Elle raccrocha alors que son angoisse remontait face au silence qui s'imposait brutalement dans la pièce.
Quelques instants plus tard, Ondine entendit la sonnette retentir. Elle ouvrit la porte tout en prenant son sac à main puis fit la bise rapide à sa grande sœur, qui inquiète, lui demandait ce qui se passait. Ondine lui répondit vaguement, qu'elle ne savait pas plus qu'elle, elles partirent en direction du véhicule de Daisy puis entrèrent dedans.
Le silence était amer. Concentrée sur la route, Daisy essaya de ne pas montrer son inquiétude. Elle avait peur d'augmenter l'angoisse de sa petite sœur puisqu'elle savait qu'Ondine était une personne très sensible quand il s'agissait de Sacha. Elle lâcha un soupir de soulagement en apercevant peu à peu le bâtiment de la petite clinique St Marguerite au bout de la route.
« Délia t'as dit où elle se trouvait ? »
« Non. Attends, je vais l'appeler. »
Elles descendirent du véhicule et se dirigèrent vers le bâtiment, tandis que la rouquine recomposa le numéro de Sacha. A la première sonnerie, la voix de Délia retentit dans le téléphone.
« Je suis au deuxième étage. Je serai dans le couloir.»
Quelques mots échangés plus tard, Ondine rangea son portable dans sa poche de son manteau.
Elles vinrent tout juste de rentrer dans le bâtiment, se dirigèrent vers les ascenseurs réservé au public puis Daisy appuya sur le bouton ce qui fit ouvrir les portes de l’ascenseur quelques secondes plus tard. Les deux jeunes femmes rentrèrent dans la cage d'ascenseur puis la cadette appuya sur la touche numéro deux, ce qui ferma les lourdes portes métalliques. Le silence était toujours là entre les deux sœurs, insupportable. On pouvait sentir l'angoisse qui les étouffe, qui les rendaient impuissantes. Elles avaient l'impression que ce voyage dans l'ascenseur était interminable. Enfin arrivées à l'étage concerné, les deux femmes sortaient de l’ascenseur d'un pas rapide vers une silhouette familière, au milieu du couloir.
« Délia ! Mais qu'est-ce qui se passe ? » Dit Daisy en la prenant dans ses bras.
Délia ne put s'empêcher de faire un petit sourire triste face à la blonde. Malgré les circonstances, elle était contente de la revoir. A cette pensée, elle se tourna vers Ondine, qui elle, était à l'encadrement de la porte de la chambre du patient.
« Il a eu une grave blessure à l'épaule. »
A l'entente de cette réponse, Ondine se retourna vers la brune, les sourcils froncés, alors que son inquiétude augmenta.
« Comment il a eu cette blessure ? »
Délia, qui était debout, s'assit sur l'une des quelques sièges du couloir, l'air terrifiée et pensive.
« C'est... »
Elle fut interrompu par l'arrivé d'un psychologue, qui arriva accompagné de la petite Clara. Délia se releva et se dirigea vers eux avec les deux jeunes femmes.
Le fameux psychologue était un homme de quarantaine d'année, d'un visage rond où le menton était camouflé par une petite barbe blonde. Ses cheveux courts mettaient en valeur ses orbes bleus, qui reflétaient le sérieux.
« Madame. J'ai à vous parler. » Dit-il alors que la petite fille rejoignit sa mère.
On sentait dans sa voix, que dans ces quelques mots, l'importance était haute.
« Euh... ce sont des amies de Sacha, vous pouvez parler à leurs présences. » Déclara-t-elle tout caressant les cheveux de sa fille, qui était auprès d'elle.
Les deux jeunes femmes dévisagèrent discrètement la petite fille. Elles ne l'avaient jamais vu auparavant. Est-ce la fille de Délia se demandaient-elles silencieusement alors qu'elles échangèrent un regard interrogative.
Le psychologue acquiesça à la déclaration de Délia.
« Je pense que c'est préférable de vous asseoir. »
La mère sentit que la nouvelle ne serait pas si bonne qu'elle espérait. Ondine et Daisy s'assirent à côté d'elle, comme pour la rassurer, la soutenir. Elles doutèrent que quelque chose n'allait pas.
« Vous avez raison sur un point, votre fille a bien subit des attouchements de la part de votre compagnon. »
A cette révélation, Délia mit sa main à sa bouche, tout en essayant de retenir ses larmes. Elle tourna sa tête vers la porte ouverte, où il y avait son fils qui dormait toujours sous perfusion. Son fils le savait. Il le savait, et elle n'avait rien vu.
« Oh mon Dieu... »
La voix d'Ondine retentit soudainement, dans le récent silence. Maintenant les deux sœurs savaient que cette enfante était sa fille. En quelques secondes, la rouquine avait l'impression de rien connaître de la vie de Sacha. Qui savait qu'il avait une petite sœur ? Qui savait que son beau-père avait un comportement étrange envers les enfants ? Personne. Sacha avait garder tout cela pour lui, comme s'il avait peur que quelqu'un découvrait ce qui se passait réellement dans sa vie familiale. En avait-il honte ? Peut-être qu'il avait eu des problèmes lui aussi avec le compagnon de Délia ? Tant de questions survenaient dans sa tête. Elle se sentait perdue. Elle croisa le regard de sa sœur, qui elle, semblait aussi pensive qu'elle.
« Est-ce qu'il... enfin, il n'y a eu que des attouchements ? »
Attouchements. Délia avait tellement eu du mal à le dire. Ce mot ne voulait pas sortir de sa bouche. Le dire, c'était comme si elle se sentait salie. Elle rapprocha son enfant d'elle, comme pour se pardonner de n'avoir pas vu depuis tout ce temps que cet homme lui faisait du mal.
« Non. Un médecin l'a consulté, il n'y a pas eu plus. »
A l'entente de cette réponse, les trois femmes se sentaient malgré elles soulagées.
« Par rapport aux conséquences, cela dépends des réactions de Clara. Elle peut avoir des cauchemars, des problèmes à se faire des amis, de garder une relation stable avec une personne, que cela soit la famille ou autres, voire aussi un manque de confiance en soi... »
Ondine blanchit peu à peu à l'entente de cette liste de conséquences. Elle avait l'impression qu'il décrivait le caractère de Sacha et au fond elle, elle commença à douter sur le fait qu'il soit peut-être lui aussi victime de son beau-père.
« Ondine ? Tu es toute blanche. » Remarqua Daisy « Je vais te chercher quelque chose à boire au distributeur. »
Daisy partit au bout du couloir où il y avait un distributeur de boissons, alors que le psychologue s'en alla peu après dans son bureau avec Délia et Clara. Ces dernières revinrent quelques minutes plus tard auprès d'Ondine, en possession de la feuille de la prochaine consultation. Délia rangea le papier dans son sac, tandis qu'elle se posa à côté de la rouquine, Clara entre elles.
« Ondine ? »
La brune posa sa main sur la sienne, ce qui la fit sursauter.
« Désolée, je ne voulais pas te faire une frayeur. » Dit-elle en retirant sa main.
Ondine lui fit un petit sourire mélancolique, qui semblait remplacer tous les mots du monde, comme si elle voulait la rassurer.
« Lorsque le psychologue à citer les conséquences, j'avais l'impression qu'il décrivait le comportement de Sacha. »
A chaque mot que la rouquine prononçait, le visage de Délia se décomposait de plus en plus, tandis que sa peau blanchissait au fur et à mesure que les paroles lui arrivaient à ses oreilles.
« Quoi ? » Répondit-elle d'une voix blanche.
Ondine se sentit mal-à-l'aise. Qu'est-ce qui lui a pris de lui avoir dit cela, alors que la situation était assez délicat.
« Non. Écoutez, ça n'a sûrement rien à voir. Je fais sûrement des films dans têtes et ça doit être le choc, puis.... »
Elle fut interrompue par l'arrivée de Daisy.
« Tiens, un chocolat chaud. »
Après avoir fourni le verre chaud à sa petite sœur, l’aînée s'arrêta devant Délia, afin de lui donner une boisson chaude.
« Je pensais que vous aurez besoin d'en prendre un. »
Elle lui remercia tout en prenant le gobelet de sa main légèrement tremblante. Soudain, une sonnerie d'un téléphone sonna dans le silence pesant. Daisy sortit son téléphone mobile de sa poche de son manteau, et regarda le nom de l'appelant.
« Oh, c'est Lily, je dois répondre. »
Elle s'éloigna des deux femmes d'un pas rapide, alors qu'elle jeta son gobelet vide dans la première poubelle venue. La petite Clara, qui écoutait discrètement la conversation depuis le début, s'agita. Elle se demandait au fond d'elle si Sacha avait tenu parole, si elle devait dire ce qui s'était passé au parc à sa mère ou pas.
« C'est tellement logique pourtant... » Délia soupira alors qu'elle déposa le verre en plastique au sol, sans avoir réussi à prendre une seule gorgée. « J'ai des doutes depuis un certain temps. Je crois qu'il s'est vraiment passé quelque chose. Antoine lui a fait du mal et je n'ai rien vu... »
Les larmes roulèrent peu à peu sur ses joues, alors qu'elle cacha son visage fatigué au creux de ses paumes, la tête baissée, tandis qu'elle sentit la honte s'abattre sur elle.
« Maman ? »
Délia prit sa fille sur ses genoux.
« Tout va bien, Clara. Tout va bien. »
Mensonge. Des mots remplis d'illusions. La petite fille voyait bien que ce n'était pas vrai. Elle tritura ses mains avec une pointe d'anxiété ; peut-être que c'était à cause d'elle que sa mère se sentait pas bien, se disait-elle intérieurement. Elle a peut-être fait quelque chose qui l'a mis dans cet état ? Faut peut-être lui révéler son secret qu'elle partageait avec son grand frère ? Est-ce que c'était à cause du secret que Sacha était à l'hôpital ? Elle se sentait mal, et la seule chose qu'elle voulait faire, c'était de lui dire, et de savoir ce qui se passait vraiment.
« Pourquoi tu as pleuré ? Tu es triste ? »
« Maman a juste un coup de fatigue. »
Elle lui avait déjà dit cela avant d'aller à l'hôpital, maintenant Clara avait du mal à la croire.
« Pas vrai. »
Délia réagit au quart de tour lorsqu'elle comprit que sa fille avait saisi que quelque chose se passait. Elle la dirigea sur le siège entre Ondine et elle.
« Assis-toi ma chérie » lui dit-elle alors qu'elle se leva de son siège afin de se baisser à sa hauteur sous le regard de la jeune femme.
« C'est à cause de moi que tu as pleuré ? »
Les yeux écarquillés, Délia la rassura en la prenant ses mains dans les siennes.
« Non, pas du tout ! »
« C'est à cause de Sacha ? »
Délia fronça les sourcils ayant l'impression que sa fille avait encore quelque chose à dire.
« Comment ça à cause de Sacha, ma puce ? »
Elle la voyait mordre sa lèvre inférieure. Délia n'avait aucun doute sur le fait qu'elle lui cachait quelque chose. Le silence de Clara lui rappela la situation dans laquelle elles se trouvaient. Et si elle savait une chose importante sur Antoine ?
Le regard fuyant, Clara n'osa pas rencontrer les deux orbes bleus de sa mère. Délicatement, tout en contrôlant son angoisse et ses peurs, Délia releva la tête de sa fille tout en espérant au fond elle qu'elle se trompait. Antoine n'avait pas pu faire cela. Elle se le répétait inlassablement Elle s'efforça à croire qu'il n'avait rien fait, mais la réalité ne faisait que la frappé de plus en plus force à chaque instant.
« Clara, si tu sais quelque chose, il faut me le dire. C'est très important. »
Assis entre les deux femmes, Clara se sentait piégé, alors qu'elle essaya de parler sans bredouiller.
« Il était d'accord pour le dire en premier. »
Ondine et Délia se jetèrent un regard d'incompréhension avant de se concentrer sur Clara.
« Dire quoi mon ange ? »
Clara resta silencieuse, tout en tournant sa tête de chaque côté, signifiant qu'elle refusait de répondre à la question posée. Elle se persuadait que Sacha lui en voudrait si elle révélait leur secret, puis le but d'un secret est de ne rien dire...
Une envie de pleurer la submergea, alors qu'elle refusait de répondre à sa mère. Cette dernière soupira, las, prête à baisser les bras. En voyant Délia désespérée, Ondine décida de l'aider alors que sa grande sœur était toujours au téléphone. Elle se baissa, elle aussi à la hauteur de Clara, puis essaya de la convaincre de révéler ce qu'elle leur cachait.
« Tu ne veux pas que Sacha aie des problèmes, n'est-ce pas? »
La petite fille lui répondit non de la tête, alors que ses larmes menacèrent de couler. Quelques minutes plus tard, elle craqua, alors qu'elle divulgua tout en bégayant.
« C'était quand on jouait à cache-cache. On parlait tous les deux et il... il m'avait demander si papa venait dans mon lit la nuit et... et je lui ai répondu oui. » Disait-elle les joues remplies de larmes.
Ondine et Délia ne s'attendait pas à cette révélation, alors que cette dernière lui passa son pouce sur ses joues afin de disparaître un peu ces larmes.
« Il souhaitait que je te le dise mais au début je ne voulait pas. Après il m'avait dit que s'il te dirait ce qui s'est passé pour lui, je le dirait aussi. »
Ondine fronça ses sourcils. Il manquait un élément dans sa réponse, elle sentait que quelque chose d'important était absent dans cette grande révélation.
« Il devait dire à ta maman ce qu'il s'est passé avec lui ? Mais comment ça ? Il a eu quoi ton grand frère ? »
Délia reprit les mains de Clara dans les siennes, comme pour lui donner du courage.
« Il m 'a dit que son papa lui avait fait la même chose. »
Les yeux écarquillés, Délia se sentait détruite peu à peu au fond elle. Elle avait enfin la confirmation, mais un autre doute s'installa en elle. Mais de qui Clara parlait ? Était-ce le père biologie de Sacha ou d'Antoine ? Venant de sa propre fille, elle pensait qu'il s'agirait d'Antoine. Sacha lui avait sûrement dit que c'était son père afin de la mettre en confiance. Mais elle avait toujours ce doute alors que les derniers mots de sa fille se répétaient dans sa mémoire, elle tourna sa tête vers la rouquine, qui elle, s'était remis à sa place, bouleversée. Qui aurait cru que l'homme dont elle était amoureuse aurait réalisé de telles atrocités ? Personne. Alors que toutes ces renseignements se bousculaient dans sa tête, Ondine informa Délia qu'elle alla au toilette. Sur le chemin pour s'y rendre, ses larmes roulèrent furtivement sur joues alors qu'elle laissa enfin éclater sa peine au grand jour.
Jeu 09 Mai 2013, 21:55
