Un vol sous pression

James poussa un soupire dès que ses fesses touchèrent le siège en velours de la place à côté du hublot de l'avion dans lequel lui et ses co-équipiers venaient d'embarquer.

Il resserra le bob en tissu qu'il portait sur la tête et qui camouflait une grande partie de ses cheveux bleus, jeta un coup d’œil à sa chemise à manches courtes verte dont il lissa les plis avec les paumes de ses mains, fit de même avec son short, puis tapota sa fausse moustache pour qu'elle reste bien en place.

Miaouss, affublé d'un déguisement d'enfant rebelle – casquette à l'envers, lunettes de soleil, tee-shirt jaune et grosses baskets, avait pris place à côté de lui.

« J'dis juste que nous ôrions pu être dans le même ôvion qu'le morveux si môdame la baronne Jessie n'avait pô choisi cette matinée pour faire son prôcieux soin côpillaire. », lança le Pokémon parlant alors qu'il détachait son sac-banane en bandoulière attaché à son torse pour le poser négligemment sur la petite tablette pliable à sa disposition dans un vacarme de clic-clac-woosh.

« Pardon ?! », s'offusqua Jessie, qui était protégée par un élégant chapeau de paille bleu marine et blanc et qui portait des lunettes rectangulaires rouges, lui donnait en effet le look d'une personnalité importante. Cette dernière fermait leur ligne et était assise côté couloir. « Ce n'est pas moi qui avait absolument besoin d'une sieste de chat à quinze minutes de partir pour l'aéroport ! »

La jeune femme qui avait noué ses cheveux magenta en un chignon bas, jambes croisés dans son short en jean beige, avait l'avant bras posé sur l'accoudoir entre eux, poing serré, et se penchait vers le félin d'un air menaçant, peu soucieuse de son décolleté à motif fleurit exposé à la vue de ses compagnons.

« Chut ! », siffla James à voix basse, sourcils froncés. « Vous voulez qu'on nous vire de l'avion avant qu'il ne décolle ?! »

Miaouss et Jessie continuèrent de rejeter la faute sur l'autre mais James les ignora pour fouiller dans le totebag à ses pieds. Il laissa ses mots fléchés et son stylo bic à quatre couleurs pour plus tard et sortit le journal du jour qu'il avait acheté au kiosque.

Les deux hôtesses de l'air faisaient leur discours habituel sur la sécurité, la façon de mettre correctement leur ceintures, blablabla, mais les membres du trio n'y prêtèrent pas attention ; depuis qu'ils suivaient Sacha et Pikachu ainsi que son nouvel ami – Goh –  à travers les différentes régions où les deux jeunes faisaient des journées éclair, ils connaissaient les mesures de sécurité encore mieux que leur devise.

Donc James se plongea dans sa lecture, Miaouss sorti deux figurines Pokémon – un Dracaufeu et un Léviator – pour jouer avec, et Jessie faisait déjà défiler la liste des films que la compagnie proposait pendant le trajet grâce à une petite télécommande.

Malheureusement pour James, il n'arriva pas à se concentrer sur les informations qu'il lisait puisque des chuchotements intrusifs bourdonnaient dans ses oreilles. En levant les yeux, il constata que les autres passagers bougeaient plus que d'habitude. Et en prêtant attention aux échos, il ramassa également quelques brides de conversations curieuses.

« Regarde, c'est bien elles ! »

« Ondine, la championne d'Azuria ! »

« Et la coordinatrice en herbe, Flora de Bourg-en-Vol ! »

« Elles sont tellement belles dans leur uniforme d'hôtesse de l'air ! »

James fronça les sourcils, ces deux noms chatouillant une mémoire lointaine au fond de son cerveau. Il quitta son journal des yeux pour regarder les fameuses hôtesses de l'air qui vérifiaient que toutes les ceintures de sécurité soient parfaitement attachées depuis l'avant de l'avion.

Les deux hôtesses portaient l'uniforme ; une chemise blanche munie d'une cravate, une veste bleue marine par-dessus, ainsi qu'un tailleur de même couleur qui exposait leur jambes. Du maquillage faisait ressortir leur yeux respectivement turquoises et bleus.

Ondine et Flora...

Une rousse aux cheveux mi-long lui arrivant jusqu'aux épaules et une brune aux cheveux courts...

James plissa les yeux en les imaginant avec quelques années de moins, habillé de vêtements d'aventure pour un voyage Pokémon, une couette sur le côté pour l'une et une bandana pour l'autre.

Oh.

A cette réalisation, James sursauta brusquement en froissant ses journaux, ne pouvant s'empêcher de lâcher un bruit entre un hoquet et un cri de Ptéra. Réaction en chaîne oblige, Miaouss sursauta à son tour tout en sifflant instinctivement, pupilles écarquillées derrière ses lunettes de soleil et oreilles dressées en alertes quoique légèrement aplatit par sa casquette.

« Non mais çô va pô d'me faire peur comme cô ?! », attaqua-t-il, griffes dégainées autour de ses figurines Pokémon.

« Bah qu'est-ce qui t'arrive ? », demanda Jessie en quittant son écran des yeux, légèrement surprise par la réaction soudaine de son co-équipier. « On dirait que t'as vu un fantôme. »

James rentra son cou dans ses épaules pour éviter d'attirer encore plus l'attention et se pencha vers eux en leur faisant signe d'en faire de même.

« Les morveuses ! », chuchota-t-il dans l'urgence.

Miaouss ralentit son rythme cardiaque en prenant des inspirations, paupières fermées. Une fois calme, il rentra ses griffes, posa ses jouets sur sa table, et lissa doucement le pelage de ses bras tandis qu'une de ses oreilles pivotait lentement vers la voix de ses compagnons qui parlait au-dessus de lui.

« Quoi ? Où ça ? », voulu savoir Jessie en relevant la tête pour regarder les passagers des autres sièges.

« Non, arrête, tu vas te faire remarquer ! », rétorqua James en lui baissant aussitôt la tête.

« Hé ! Fais doucement à mon chapeau ! », râla la chef d'équipe qui se conformait malgré tout.

« Les hôtesses de l'air ! Ce sont elles, les morveuses ! La morveuse originale, et le morveuse d'Hoenn ! », expliqua-t-il à toute vitesse.

Jessie resta silencieuse le temps d’assimiler ce qu'il venait de dire, et finir par arquer un sourcil curieux. Elle se redressa doucement pour sortir de la prise de James, s'assit correctement dans son siège, et pencha la moitié de son corps dans l'allée pour observer les deux hôtesses de l'air. Ces dernières se trouvaient à la moitié de l'avion mais elles progressaient rapidement.

Jessie dévisagea leur costume de haut en bas sans vergogne. La rousse et la brune étaient légèrement plus âgées que la dernière fois qu'elles avaient croisés leur route, et elles étaient plus grandes – certainement grâce à leur escarpins blancs. Elle ignora le poids de Miaouss contre son épaule qui s'appuyait afin d'observer également les deux prétendues morveuses.

« Il a l'air d'avoir raison... », murmura Jessie alors que Miaouss acquiesçait.

« Mais qu'est-ce qu'elles fichent ici ? J'crôyais qu'la morveuse originale ôvait une arène à s'ôccuper ! », demanda le félin une fois qu'il s'était remis assis à sa place.

« Et je croyais que la morveuse coordinatrice se trouvait dans une région différente pour faire d'autres concours. », se souvenu Jessie en croisant les bras.

« C'est peut-être un stâge que la compônie de vol a autorisé aux morveuses ? Ils leur autorisent toujours tout... »

« Ou alors c'est pour la promotion d'une nouvelle ligne éphémère de vol qui relie et désert les régions de Kanto, Hoenn et Sinnoh. », proposa James avant de prendre son menton entre son pouce et son index. « Il me semble avoir vu brièvement ce genre d'informations quand j'ai pris les billets d'avion. »

« Et t'aurais pas pu nous le dire plus tôt ?! », accusa Jessie à voix basse, mécontente.

« On avait loupé le vol dans lequel le morveux et Pikachu sont partis, donc excuse-moi de m'être dépêché de prendre le prochain sans faire gaffe aux détails ! Et puis d'abord, comment je pouvais savoir que les morveuses seraient à bord ?! »

« Ouais bô t'ôrais pu mieux r'gorder ! », reprocha le félin.

« Non mais je rêve, ça va être de ma faute, maintenant ?! C'est de votre faute à tous les deux si on est dans cette situation ! », riposta James en les pointant de son index accusateur. Devant leur air penaud, il se calma et reprit le bout de journal qui pendait dans l'air. « Et pour en revenir au pourquoi les deux morveuses sont ici en tant qu'hôtesse de l'air, la seule supposition que je pourrais faire, ce serait parce qu'avoir la championne d'arène d'Azuria aiderait les bénéfices de la compagnie de vol. Et sans compter que l'autre morveuse, ayant participé à de nombreuses concours et festivals, s'est fait une réputation et peut également attirer des clients. »

Jessie bourdonna en guise de réflexion.

« Mmh oui, donc ce serait gagnant-gagnant pour les deux parties. », conclut-elle.

« Probablement. Mais c'est pas important, au final. Maintenant, tout ce que nous avons à faire, c'est faire profil bas et tout ira bien. », rassura l'adulte aux cheveux bleus. « N'attirons pas l'attention – »

« Miaouss ! », jura le chat parlant en lui coupant la parole. « Elles arrivent ! »

Le trio s'embrouillèrent les pinceaux dans des grands mouvements de bras et jambes, tout en chuchotant entre eux de se taire. Ils finirent par se calmer mais ils restèrent tendu ; le dos droit, James se cachait derrière son journal, Miaouss jouait mécaniquement avec ses figurines Pokémon en faisant des bruits de bébé alors qu'il était censé avoir la dizaine ou la douzaine d'années, et Jessie  faisait à nouveau défiler la liste des films, la joue posée contre son poing, accoudée et l'air nonchalante malgré son ongle qui martelait anxieusement la touche descente de la télécommande.

Ça commençait tellement mal...

Pendant que Flora s'occupait de la rangée de l'autre côté de l'allée, ce fut Ondine qui vérifiait leur ceinture. Et c'était peut-être le stress ou la proximité de la morveuse, mais au lieu de se taire et de la laisser faire son travail pour qu'elle puisse passer aux passagers suivants, Jessie eut la merveilleuse idée de parler.

« Oh ! Vous ne savez pas combien je souis contente de vous vouâlr vérifiez les ceintulres de sécourité, mademoizelle ! », s'exclama Jessie d'une voix reconnaissante en portant une main sur son cœur et en levant les yeux au ciel. « Dans l'autre vol que j'ai prlis pourl' mes vacances d'été, les hôtesses de l'airl ne l'ont même pas fait. J'ai trlouvé ça scandaleux ! »

Oh bon sang.

Pourquoi elle prenait un accent étranger ?! C'était encore plus suspect !

James fit un effort considérable pour ne rien montrer de sa panique. Il lâcha une partie de son journal et utilisa sa main en guise de visière pour cacher ses yeux, trop peur de voir les dégâts. Mais heureusement pour le trio, la morveuse championne d'arène n'y vu que du feu puisque lorsqu'il jeta quand même un coup d’œil, cette dernière souriait doucement à Jessie.

« C'est normal, madame. Après tout, notre but est de vous emmener à destination en toute sécurité. »

« Merci pourl votlre plrofessionnalisme, vrlaiment. », continua Jessie en prenant brièvement la main de la rousse dans les siennes pour la secouer.

Avec un dernier hochement de tête, Ondine quitta la lignée du trio pour vérifier les autres passagers derrière eux. Une fois sa tâche terminée, la rousse disparue derrière des rideaux épais en velours bleu marine.

La voix du commandant de bord annonça le décollage imminent de l'avion, les moteurs vrombirent, et l'appareil avança. L'avion fut dans les airs quelques minutes plus tard. Ce fut calme pendant un moment, sans aucun passage des deux morveuses à travers l'allée.

James tournait la page de son journal dans un froissement de papier, Miaouss entrechoquait ses figurines Pokémon entre elles dans des bruits d'explosions, et Jessie s'impatientait, comme en attestait son index qui battait la mesure sur le bord de son accoudoir.

« Tu ne regardes pas les films qu'ils proposent, Jess ? », voulu savoir James en lui jetant un coup d’œil.

« Non, j'ai regardé la liste et les films sont franchement inintéressants. », répondit-elle, les sourcils froncés de contrariété.

« Tu peux faire sortir Qulbutoké ? », demanda Miaouss en abaissant ses figurines et en tournant la tête vers elle. « J'commence à m'ennuyer aussi, à jouer tout seul... »

« Hors de question de faire sortir cette grosse patate bleue. », refusa aussitôt la chef du groupe. « Tu veux nous faire encore plus repérer ou quoi ? »

Miaouss fit la moue, déçu.

« Elle a raison, Miaouss. », ajouta doucement James. « Surtout que nous n'avons pas pris de déguisement pour lui, tout est dans les valises. Ce serait compliqué. »

« Tu n'as voulu prendre que tes jouets alors fait avec. », asséna Jessie. « Regarde, moi je m'ennuie à mourir mais je ne me plains pas à haute voix pour autant. »

« Allez, nous n'avons qu'une heure de vol ; c'est super court contrairement à nos vols jusqu'à la région de Kalos. », essaya James à l'encontre de sa co-équipière.

« Ouais bah c'est encore trop long à mon goût ! », s'exclama Jessie. « Tu sais bien que je déteste attendre, James ! J'ai envie d'un peu d'action, moi ! »

Et puis, sans prévenir ses co-équipiers, elle interpella la morveuse championne d'arène qui passait devant leur rangée en lui chopant l'avant-bras. La rousse se tourna de moitié en papillonnant des yeux, surprise par son geste brusque.

« Excouzez-moi, mademoizelle ; j'aimelrais vous faire palrt d'oune petite ounquiétude. », dit-elle d'une voix douce en contraste totale avec son attitude volcanique.

« Oui, qu'y a-t-il ? », voulu savoir Ondine, confuse mais prête à aider.

« Eh bien, je n'ai pas pu m'empêcher de remarlquer que vous n'aviez pas vos Pokémon sulr vous. S'il y a un plroblème avec oune passager dangereux, j'aimerais me sentir plrotégé, vous compl'renez. »

Oh c'est pas vrai, pensa James en passant une main fébrile sur son visage horrifié tandis que son cœur faisait une embardée. Elle allait faire capoter leur couverture alors qu'ils venaient à peine de décoller !!

A ce moment-là, Miaouss eut la même pensée que lui. Étant juste à côté d'elle, le félin réagit aussitôt ; il tendit la patte pour agripper la cuisse de Jessie afin de l'arrêter. Il n'eut aucun remords en enfonçant ses griffes dans son short, provoquant une grimace de la part de sa co-équipière, qui inspira entre ses dents, les muscles tendus.

« Ne vous inquiétez pas, madame ; les membres de notre équipage seront prêt à intervenir s'il y a le moindre problème. », rassura Ondine en posant une main sur celle de Jessie tenait toujours son avant-bras. Elle repéra la main agrippée de Miaouss sur le vêtement de Jessie. « Excusez-moi mais... votre enfant n'a pas l'air bien. C'est son premier vol ? »

« Oh non non. », répondit-elle en lâchant le bras de la morveuse et en agitant sa main. « Il a simplement oune poigne... acélrée poulr son âge. », articula-t-elle dans un sourire pincé avant de prendre doucement sa patte entre ses doigts. « Il a oune petit peur mais rien de bien glrave, oune fois qu'il aura plris ses calment poulr le mal de l'ailr, ça ira mieux. Allez, tout va bien mon chéri, tou dois te détendre. »

Dos à la morveuse, Jessie siffla le dernier mot, la tête tournée vers lui, non sans un regard noir pour lui intimer de gainer ses griffes. Miaouss lui rendit son regard et commença également à grogner en guise d'avertissement.

James, effrayé que le grondement du félin ne les trahissent, couvrit aussitôt le bruit avec une toux grasse, poing fermé devant sa bouche. Ce qui attira aussitôt l'attention de la morveuse aux cheveux roux.

« Vous allez bien, monsieur ? », s'inquiéta Ondine.

« Euh, oui oui, je vais bien. », assura-t-il d'une voix bourrue. « J'ai dormi avec la fenêtre ouverte la nuit dernière et – mmrrh, mmrrh – j'ai la gorge sèche, voyez-vous. »

« Oh, je vois. Ma collègue va bientôt arriver avec le chariot de collations et de boissons ; vous pourrez vous désaltérer. »

« Merci, vous êtes formidable ma petite. »

James observa ensuite la championne d'arène baisser les yeux sur ses deux co-équipiers. Miaouss avait cessé de grogner et avait enfin lâché le jean de Jessie, tandis que cette dernière tenait encore fermement sa petite patte entre ses doigts.

« Tout va bien pour vous, madame ? », s'assura une nouvelle fois Ondine en posant une main sur le haut du siège passager.

Jessie tourna la tête vers elle et sourit.

« Oui. Merlci pour votlre ounquiétude. »

Mais visiblement, Ondine ne comprit pas le signal pour les laisser tranquille. Elle restait toujours debout à observer Jessie, comme si elle essayait de reconstituer un puzzle. Cela perturbait le trio qui commençait à transpirer d'anxiété. Jessie, qui venait enfin de lâcher la patte de Miaouss, refusait d'éclaircir sa gorge sèche par crainte de montrer un quelconque malaise. Elle se força à rester immobile pour ne pas bouger instinctivement sous le regard silencieux de l'hôtesse de l'air.

« Un plroblème ? », voulu savoir Jessie en roulant parfaitement sa langue.

« Eh bien... », commença prudemment la rousse en la regardant dans les yeux. « C'est étrange mais j'ai l'impression de vous avoir déjà vu quelque part. »

« Oh ! Oui, je sais. », répondit-elle aussitôt en portant une main sur son cœur et en riant. « Clroyez-le ou non mais on me dit toujoulrsça ! C'est sans doute palrce que j'ai oune visage magnifique qui va palrfaitement sur oune magazine de mode. Vous ne tlrouvez pas ? »

A ce moment-là, James et Miaouss pensèrent que leur co-équipière en faisait légèrement trop mais ils n'osaient pas l'interrompre ou faire un seul geste, de peur de paraître encore plus suspect.

« Euh... », hésita Ondine. « Je dois admettre que vous avez en effet l'air d'être le type de femme a figurer sur un magazine de mode. C'est peut-être ça... »

« Oh, merlci, mademoizelle. Vous êtes adolrable. », dit Jessie avec reconnaissance, comme si elle n'était pas partie à la pêche aux compliments.

Après ces mots, Ondine les quitta. Le trio resta silencieux jusqu'à ce que la morveuse soit retourné dans sa cabine, puis ils éclatèrent aussitôt que la voie fut libre.

« Non mais t'es folle ?! », s'outra James à voix basse.

« Pourquoi t'as dit tout çô ?! », renchérit Miaouss en faisant de son mieux pour garder sa voix pincharde à une volume bas.

« Si tu m'as griffé jusqu'au sang, sac-à-puces, j'te préviens que tu vas passer un sale quart-d'heures ! », menaça Jessie, sourcils froncés au maximum. « Tu sais combien ce short m'a coûté ?! »

« Boah tu l'a même pô payer ! », répliqua Miaouss du tac-o-tac.

« Jessie ! », siffla James pour avoir son attention et recentrer la conversation. « On peut revenir sur ce que tu as fait sous le coup de l'impulsion ? »

« Quoi ? Ma question et mes arguments étaient parfaitement légitimes de la part d'une étrangère ! », fit valoir Jessie. « Réfléchissez un peu ; les morveuses sont là ! Ce qui veut dire que leur Pokémon aussi ! On peut en profiter pour leur voler leur Pokémon au passage ! On fera d'une pierre deux coups ! »

« T'ôrais pu nous prévenir pour qu'on mette ô point un plan ! »

« J'vous rappelle que c'est moi, le chef du groupe. », rétorqua Jessie en se pointant du pouce. « S'il y a une opportunité à saisir, j'ai le droit d'agir sans vous en parler. »

« Peut-être bien mais t'as failli nous faire démasquer ! », argumenta James.

« Pff et même s'ils nous démasquent, ils vont faire quoi ? Nous pousser de l'avion en plein vol ? », demanda Jessie d'un air désinvolte.

« Euh. Oui. Oui, ils vont nous pousser de l'avion en plein vol, Jess. », répondit sérieusement James.

« Ou utiliser leur Pokémon pour envôyer vers d'ôtres cieux. »

« Plutôt cette option oui, tu as raison, Miaouss. », acquiesça James en le pointant de l'index.

Jessie roula des yeux puis observa les autres passagers qui se trouvaient dans l'allée, bras croisés.

« J'm'en suis parfaitement sorti sans nous faire soupçonner. », marmonna-t-elle.

« C'était trop risqué ! »

« Et depuis quand on a peur des risques ? », répliqua Jessie en retournant aussitôt la tête vers son co-équipier. « C'est le résultat qui compte. »

« Bien sûr, parce que toutes tes simulations d'entraînement à l'académie Rocket étaient un sans-faute et que tu n'as pas laisser tomber dix de tes anciens co-équipiers avant moi. », rappela James sur un ton ironique.

« Oh mon dieu, tu remets encore ça sur le tapis ? J'en ai marre que tu t'en tires avec cet argument à chaque fois ! », s'irrita Jessie. « Ma façon de faire était très bien, ce sont les règles de l'académie qui étaient trop conformistes ! »

Miaouss poussa un lourd soupire pour les couper dans leur dispute.

Une fois les deux calmés – James rangeant son journal au profit de ses mots fléchés et de son stylo, et Jessie s'adossant au fond de son siège en fermant les yeux pour faire une sieste – Miaouss tendit les pattes pour ouvrir la fermeture éclair de son sac-banane. Il sortit un petit bocal en verre de pâté pour chat ainsi qu'une petite cuillère à café. Se léchant les babines, il ne tarda pas à ouvrir le pot et à commencer à manger, ronronnant de plaisir.

James avait réussi à compléter tout une grille de mots fléchés lorsque la silhouette de la morveuse aux cheveux bruns attira son attention. Cette dernière avançait à reculons dans l'allée tout en tirant le chariot de collations. Il croisa son regard et eut un moment de panique qui le força à tousser dans son poing. Ce fut tout ce qu'il fallait à Flora pour lui adresser la parole.

« Un rafraîchissement, monsieur ? »

Il s'éclaircit la gorge, tapota à nouveau sa fausse moustache, et hocha la tête.

« Je veux bien de l'eau pétillante, très chère. »

Miaouss, toujours concentré sur sa pâté, se décala mécaniquement pour permettre au bras de James de prendre la bouteille que la morveuse brune lui tendait dans un remerciement.

« Merci ma petite. », dit-il ouvrant immédiatement sa boisson dans un pshhit.

Le félin, sentant qu'on l'observait, releva la tête alors qu'il mâchouillait encore sa pâté. Il croisa le regard septique de Flora où une lueur de jugement brillait dans le bleu de ses yeux, comme si elle trouvait ça étrange et curieux à la fois. Les poils sur sa fourrure se redressèrent instinctivement.

« Bah quôa ?! Vous ôvez jômais vu quelqu'un manger d'la nourriture pour animaux ? », accusa-t-il tandis que la queue dans son dos tapait un coup sec contre le dossier de son siège.

Jessie, qui était pleinement réveillé, et James ricanèrent nerveusement avant de passer aussitôt à l'action pour désamorcer la situation.

« Excusez son langage grossier, mademoiselle. », intervint James en posant une main rassurante sur l'épaule du Pokémon parlant.

« Oui ap'lès tout, qui n'a jamais goûté à des c'loquettes ou de la pâté oune fois dans sa vie, n'ech-ce pââs ? », renchérit Jessie.

« Je – », réfléchit Flora avant qu'un sourire maladroit n'étire ses lèvres. « Maintenant que vous le dites, je me rappelle que mon petit frère en a déjà mangé quand il était à la maternelle. »

Elle tourna ensuite la tête vers Miaouss, s'accroupit pour se mettre à sa hauteur, puis lui adressa un sourire d'excuse.

« Je suis désolé, bonhomme. Je ne voulais pas te vexer. Tu as le droit de manger ce que tu veux. »

Flora reporta ensuite son attention sur son chariot pour en sortir une brique de jus de fruits et tendre la boisson en guise de geste d'excuse.

« Tiens. Pour me faire pardonner. C'est la maison qui offre. », expliqua-t-elle.

« Euh... », hésita le chat parlant, avant de redescendre sur Terre à cause du coup de coude que lui donnait James.

Il prit la brique offerte en silence, puis fut obligé de marmonner un « Môrci. » quand ce fut Jessie qui lui donna un coup de coude dans l'épaule. Flora lui sourit à nouveau en se redressant, puis tira son chariot dans l'allée pour s'arrêter vers d'autres passagers qui l'appelaient.

« Les gars... », commença doucement Jessie, une lueur malicieuse dans ses yeux bleus alors qu'elle ne quittait pas le chariot du regard. « Je viens d'avoir une brillante idée. »

« Laquelle ? », demanda James en buvant une gorgée de son eau pétillante.

« On a appris qu'elles ont leur Pokémon mais pas sur elles, n'est-ce pas ? », demanda-t-elle. Au hochement de tête de ses co-équipiers, Jessie continua. « Leur Pokéball doivent probablement être rangées dans leur cabine de vol. Miaouss. Tu vas t'accrocher en-dessous du chariot quand elle repassera et tu vas te faufiler en douce dans leurs cabines pour leur voler leur ceinture de Pokéball.»

« Super plan, Jessie ! », approuva James.

Miaouss approuva également dans un ricanement tout en plantant d'un coup sec la paille dans le petit trou, et aspira une gorgée de son jus de fruits.

« Quand elle repassera, je donnerai un coup de pied dans le chariot pour faire tomber quelques boissons. Et pendant que je l'aiderais à ramasser les cannettes, tu pourras te faufiler derrière mon dos. Avec mon grand chapeau, tu seras encore mieux caché. Compris ? », prévue-t-elle à voix basse.

« Compris. », répondit Miaouss en portant une patte en garde-à-vous à son front.

Jessie regarda Flora distribuer boissons et nourriture aux différents passagers. Une fois que la brune atteignit l'avant de l'avion, elle jeta un coup d’œil autour d'elle pour vérifier qu'aucun client ne voulait quelque chose de plus, puis elle poussa le chariot en sens inverse.

Elle approchait doucement de leur ligne au fur et à mesure que les secondes s'écoulaient. Jessie se mit en place en s'enfonçant à nouveau dans son siège pour faire mine de dormir, les paupières à moitié fermées pour guetter l'arrivée de la morveuse.

Flora était presque là.

Encore quelques mètres...

Et début du plan dans 3... 2... 1…

Jessie gémit et s'étira exagérément. Elle donna, par la même occasion, un coup de pied dans la roulette du chariot. Sa force secoua tout le chariot, faisant tinter les nombreuse boissons et en-cas, et fit dégringoler quelques cannettes qui roulèrent sur le tapis de l'allée.

« Oh, excouzez-moi mademoizelle ! », sursauta Jessie. « Je ne vous avez pas vu ! Quelle maladlroite je fais ! », joua-t-elle en se frappant le front avec sa paume. « Je souis désolé, laissez-moi vous aider. »

Ses mains agrippaient déjà deux cannettes de soda à ses pieds alors qu'elle sortait de son siège pour se mettre accroupit. Elle était en train de replacer quelques boissons sur la partie basse du chariot lorsqu'elle sentit la queue de Miaouss lui chatouiller les chevilles.

« Oh !, il y a encore oune dernière cannette qui a r'louler ! Là, der'lrière vous ! », indiqua Jessie en pointant l'objet du doigt, souriante de fierté alors qu'elle réussissait à détourner son attention le temps que Miaouss puisse s'accrocher en-dessous du chariot.

« Merci à vous, madame. », dit Flora en reposant sa boisson avec les autres et en se redressant.

« Mô de rien voyons ! », répondit Jessie en faisant de même, un sourire innocent plaqué sur le visage tandis qu'elle penchait la tête sur le côté pour l'amadouer avec ses yeux de biches. « Encore désolé pour le délrangement. »

« Ce n'est rien. Faites attention la prochaine fois, d'accord ? », conseilla Flora.

« Oui, mademoizelle. », promis Jessie dans une courte révérence.

Et, alors que la brune allait repartir tout en poussant son chariot, elle s'arrêta dans son élan.

« Oh ! Au fait ! », lâcha Flora en se tournant vers Jessie – qui pivota au même moment. « Pardonnez-moi si ma remarque paraît déplacée mais j'ai la curieuse impression que vos yeux me disent quelque chose. »

Jessie frissonna instinctivement. Elle cligna des yeux derrière ses lunettes rectangulaires rouges, décontenancé par la soudaineté de Flora, avant de reprendre aussitôt ses esprits et de réagir.

« Oh, c'est peut-êt'lre palrce qu'il n'y a pas beaucoup de pe'rlsonne avec des yeux bleus aussi beaux que moi ? », supposa naturellement la chef du trio. Elle haussa ensuite les épaules d'un air nonchalant et sourit à la brune. « Apl'ès tout, on dit que les yeux sont oune fenêtre sur la porte du réf'ligé'lrateur non ? »

Totale improvisation mais les bêtises qu'elle venait de déblatérer fonctionna, puisque la coordinatrice dû, à son tour, cligner des yeux pour assimiler ce que l'adulte aux cheveux magenta venait de dire.

« Ce n'est... pas totalement cette expression mais... », répondit-elle dans un sourire mi-maladroit mi-amusé, avant de secouer la tête pour se défaire de ses pensées. « Bon, ce n'est pas grave. Je dois probablement faire erreur. A bientôt, madame. »

Flora partit en poussant le chariot. Jessie regagna enfin sa place et se tourna vers James pour taper dans les paumes qu'il lui présentait en guise de victoire.

« Phase 1, réussie ! », chuchotèrent-t-ils à l'unisson.

Miaouss, de son côté, s'accrochait à la plaque en plastique dur alors que la moquette au sol effleurait le tee-shirt dans son dos. Ils continuèrent en ligne droite avant de bifurquer doucement sur la gauche. En jetant un rapide coup d’œil, le chat parlant vit le chariot dépasser l'encadrement d'une porte. Les roues du chariot grincèrent dès qu'il s'immobilisa et Miaouss ne bougea pas d'un pouce.

Il entendit la morveuse soupirer.

« Allez, maintenant il faut aller vérifier si tout va bien du côté des conducteurs de bord... », murmura la morveuse.

Ses oreilles captèrent ensuite le son des pas feutrés de cette dernière alors qu'elle s'éloignait. Le félin attendit une bonne quinzaine de secondes avant de rétracter ses griffes et de se laisser tomber silencieusement sur la moquette. Les sens en alerte, il rampa prudemment pour sortir d'en dessous du chariot. Il se redressa enfin sur ses pattes arrières et souffla de soulagement.

Il se trouvait dans une petite pièce, une sorte de local, supposa-t-il tandis que l'éclairage du couloir l'aidait à y voir plus clair. Il se rapprocha de la sortie pour y jeter un coup d’œil et, une fois la voie libre, il se dirigea vers le couloir de gauche en rasant les murs.

Il ne marcha pas bien longtemps lorsqu'il aperçut deux grands rideaux – toujours épais et bleu marine – sur sa droite qui semblait cacher une autre salle.

Quand il poussa un pan pour vérifier ce qu'il s'y trouvait, il vit des couchettes vides dont une avait le rideau partiellement tiré. Bingo, il venait de tomber sur la loge des hôtesses. Des sacs de voyage se trouvaient au pied de chaque couchettes – certainement les affaires des morveuses. Un Tiplouf endormi reposait contre un des sacs. Il portait curieusement une veste ainsi qu'une toque bleue marine d'aviateur mais Miaouss ne n'en soucia pas plus que ça ; c'était peut-être la demande de la compagnie de vol pour plaire encore plus aux passagers.

Lorsqu'il tourna la tête à gauche, il vit un meuble incrusté d'où plusieurs papiers dépassaient. Mais plus important encore, ses pupilles brillantes se posèrent sur les ceintures remplies de Pokéballs qui se trouvaient juste à côté.

« Jackpot ! », chuchota-t-il d'une voix excitée.

Trépignant d'impatience, le chat parlant marcha sur la moquette sans faire de bruit et atteignit facilement le meuble. Il bondit sur le meuble et marcha sur les papiers qui lui collèrent instantanément aux coussinets – des brochures en papiers glacés.

« Qu'est-ce que – ?! », râla Miaouss à voix basse en secouant frénétiquement ses pattes tour à tour pour se débarrasser de cette désagréable sensation.

Les papiers se décollèrent et voltigèrent dans la salle, telle des feuilles tombées d'un arbre. Miaouss ignora leur retombées et commençait à s'emparer des ceintures de Pokéballs dans un cliquetis métallique lorsque son oreille se contracta instinctivement. Il perçut le son d'un gémissement presque interrogateur, comme si quelqu'un se faisait réveiller.

En tournant la tête pour regarder au-dessus de son épaule, il constata avec stupeur que le Tiplouf endormi commençait à se réveillait, comme en attestait une de ses nageoires qui frottait ses paupières demi-ouvertes. Les brochures de vol avaient probablement dû le tirer de son sommeil.

Lâchant les Pokéballs qu'il tenait entre les pattes sous peine de se faire prendre, Miaouss se laissa tomber sur la moquette. Tiplouf sursauta et se mit immédiatement debout, les sens en alerte.

« Ti ?! », s'exclama-t-il avant de s'approcher du Pokémon parlant, commençant à lui demander ce qu'il faisait là.

Peut-être qu'il avait une chance de l'assommer s'il plaçait une puissante attaque Tranche, songea le félin. Alors que Miaouss envisageait sérieusement d'abattre le Pokémon Eau, une autre voix s'éleva soudainement dans la cabine.

« Tiplouf ? », demanda la propriétaire en tirant le rideau qui cachait l'une des couchettes.

La jeune femme était assise, les jambes allongées, et avait une main sur le matelas pour soutenir son poids tandis que l'autre tenait toujours le rideau entre ses doigts. Elle avait des cheveux bleus, des yeux de même couleur, un visage légèrement maquillé, et une voix agaçante.

Bon sang mais combien y avait-il de morveuses à bord de ce vol ?! Est-ce qu'il allait ensuite découvrir que c'était les autres morveux qui conduisaient l'avion ??

Certes, elle aussi portait l'uniforme d'hôtesse de l'air – avec un pin doré accroché sur le côté droit de  la poitrine tandis qu'une médaille était accroché de l'autre côté, mais il n'y avait pas de doute : c'était bien une morveuse ! Celle de Sinnoh, plus précisément !

Miaouss n'avait plus aucune chances d'affronter le Tiplouf de la morveuse maintenant ! Il était beaucoup trop fort pour lui tout seul. Et il avait encore moins de chance de voler les Pokéballs des morveuses ! Il aurait du vérifier que les couchettes étaient bien vides, se fustigea-t-il mentalement.

« Oh ! Bonjour mon garçon, qu'est-ce que tu fais là ? », voulu savoir Aurore alors qu'elle le repérait enfin aux côtés de son compagnon.

« Euh, eh bien en fait... je voulais aller ô p'tit coin mais j'crois bien que j'me suis perdu. », expliqua-t-il d'une voix fluette pour correspondre à son personnage de petit garçon tout en se grattant la tête.

« Oh. Tu n'as pas vu le symbole qui indiquait les toilettes ? », demanda la coordinatrice, intriguée.

« Je, euh, bôah en fait non. », ricana-t-il dans un sourire maladroit. « Je suis trop petit. »

Un air de compréhension passa sur le visage d'Aurore, qui lui adressa un sourire rassurant.

« Ce n'est pas grave. », dit-elle en sortant enfin de sa couchette pour se mettre debout. « Ne t'inquiète pas, Tiplouf et moi allons t'y emmener. »

Aurore s'avança la première, Tiplouf sur les talons.

« Tu viens ? », encouragea la coordinatrice en lui tendant la main.

A regret, Miaouss lança un dernier regard par-dessus son épaule, abandonnant définitivement les Pokéballs qui étaient à portées de griffes, puis s'approcha de la morveuse et son Pokémon. Cette dernière lui prit la patte et le félin réagit instinctivement en se dégageant aussitôt de sa prise.

« J'aime pô qu'on me touche. J'suis peut-être petit mais j'suis plus un bébé. », justifia-t-il en croisant les bras.

« Oh, excuse-moi. », répondit Aurore avant qu'un sourire amusé n'étire ses lèvres. « Puisque tu n'es plus un bébé, tu peux me suivre comme un grand alors ? »

« Pôrfaitement. », assura-t-il en la fusillant du regard derrière ses lunettes de soleil.

La morveuse et son Pokémon eurent le culot de rire, ce qui irrita Miaouss mais il ravala le sifflement qui s'apprêtait à sortir de sa gorge. Hors de question de prendre le risque de se faire démasquer alors qu'il était isolé de ses co-équipiers.

Ils le conduire dans le couloir vide, puis ils atteignirent facilement la cabine où se trouvait les toilettes. Un jetant un coup d’œil devant lui, Miaouss vit qu'ils étaient juste à côté du compartiment où étaient tous les passagers. Le bruit d'une porte qu'on décompressait le força à reporter son attention sur sa gauche.

« Allez, je te laisse y aller. Je t'attends devant, d'accord ? », lui dit Aurore.

Miaouss bourdonna en guise de réponse puis entra dans la cabine des toilettes en prenant soin de fermer la porte derrière lui. Il attendit plusieurs minutes, grimpa sur la lunettes de toilettes pour y jeter quelques morceaux de papiers dans le trou puis tira la chasse. En décompressant la porte à l'aide du bouton, Aurore et Tiplouf étaient toujours là, comme promis.

« Allez, viens ; je vais te raccompagner auprès de tes parents. », dit-elle en faisant un mouvement de la tête vers les passagers.

Ils n’avancèrent pas bien loin pour atteindre sa rangée. Et, comme si Jessie avait sentit que quelqu'un arrivait, elle fit rouler sa tête vers le couloir.

« Ha ben c'est pas trop tôt ! », commença à râler Jessie en repérant Miaouss. « Qu'est-ce qui t'as pris  autant de t – »

Elle se coupa net en remarquant la silhouette d'Aurore et du Pokémon Eau derrière lui. Miaouss observa les yeux de ses deux co-équipiers ne cessaient de faire des allers-retours entre la morveuse et son Tiplouf, le temps que leur neurones relient les points entre eux.

« Je suis désolé de vous déranger, votre enfant cherchait les toilettes et il s'est perdu. C'est moi qui l'ai trouvé, je me suis permise de l'accompagner pour ensuite le ramener auprès de vous. », expliqua gentiment Aurore.

Jessie était tellement abasourdie qu'elle ne put que hocher mécaniquement la tête, tandis que James la remerciait automatiquement de sa voix bourrue. Après que Miaouss fut à nouveau sur son siège en velours, Aurore et son Pokémon en profitèrent pour aller saluer les autres passagers – et probablement faire leur intéressants devant les parents et les enfants qui s'émerveillaient à la vue du Tiplouf costumé.

« Non mais c'est une blague, tout l'avion est infesté ou quoi ? », pesta Jessie à voix basse.

« C'est pour çô que je ne revenais pô ! Elle et son idiot de Tiplouf étaient dans la loge des hôtesse de l'air ! », expliqua Miaouss.

« Qu'est-ce qu'ils fichaient encore dans leur loge ? », demanda James, curieux.

« Ils piquaient un stupide roupillon ! Non mais t'y crôa toi ?! », s'outra le Pokémon parlant.

« Là c'est cuit : on a aucune chance contre trois morveuses ! », abandonna l'adulte aux cheveux bleus.

Dans un soupire collectif, le trio fit n'eurent pas d'autre choix que de laisser tomber leur plan et de renoncer à d'autres improvisations. Ils furent obligé de rester calme le temps restant.

Les annonces du commandant de bord concernant leur arrivée imminente résonnèrent enfin dans les hauts-parleurs. Une fois l'avion posé en toute sécurité sur sa piste d'atterrissage et complétement arrêté, les passagers commencèrent à rassembler leur affaires et à sortir de leur rangs pour se ranger en file dans l'allée.

Le trio firent de même. Ils étaient debout en attendant leur tour. La file avançait progressivement. James en profita pour tapoter l'épaule de Jessie afin d'avoir son attention, chose qu'il obtenu lorsqu'elle pencha son corps en arrière en tournant légèrement la tête.

« Au final, on s'en est pas mal sorti. », lui chuchota-t-il à l'oreille.

« J'aurais quand même aimé voler les Pokémons des morveuses. », bougonna Jessie à voix basse.

« Je sais, Jess. Moi aussi. », dit-il avec compréhension. « Mais dis toi que c'est un mal pour un bien. »

« En quoi ? », voulu-t-elle savoir en haussant un sourcil.

« Si les morveuses sont encore sur ce vol la prochaine fois que nous le prenons, on pourra être mieux préparer, et on augmentera nos chances d'attraper leur Pokémon. », fit-il valoir.

« Il ô raison ! On montera un super plan, leur Pokémon seront à nous, et le Bôss nous dônnera une super promôtion. », renchérit Miaouss à voix basse, déterminé.

« Ouais ! », chuchotèrent-ils en chœur.

Le trio atteignit enfin la sortie qui menait à la passerelle. Aurore et Tiplouf étaient à nouveau postés à côté et saluaient les passagers en les remerciant, le sourire professionnel aux lèvres. Ils franchirent l'encadrement qui délimitait le compartiment de la passerelle, et soufflèrent de soulagement en sentant un poids se retirer de leur épaules.

« Attendez ! », s'exclama soudainement la morveuse coordinatrice.

Jessie et James se retournèrent automatiquement, les épaules à nouveau tendues, tandis que leurs cœurs s'accéléraient subitement.

« Oui, qu'y a-t-il, très chère ? », voulu savoir James de sa voix grave.

« Vos visages me disent quelque chose... On ne se serait pas déjà rencontrés ? »

Pris au dépourvu alors qu'ils pensaient être enfin débarrasser de toute suspicion, Jessie et James gloussèrent faussement.

« Ça doit sûrement être votre imagination. », supposa Jessie en replaçant correctement ses lunettes sur son visage.

« Oui, nous sommes simplement une petite famille venus prendre des vacances dans la région. », assura James en tordant légèrement sa fausse moustache.

« Môman, Pôpa, y'a un prôblème ? », demanda innocemment Miaouss de sa voix fluette.

Comme si le trio n'avait pas assez de problème à se débarrasser de la coordinatrice, la morveuse championne d'arène apparut et s'adressa à son amie.

« Un problème avec ces passagers, Aurore ? », demanda la rousse.

« Désolé, je retarde tout le monde. », dit la coordinatrice dans un sourire navré.

« Qu'est-ce qu'il y a ? »

« Je sais que ça va te paraître bizarre mais j'ai l'impression de les avoir déjà vu quelque part. Pas toi ? »

« Non mais si vous vouliez notre photo, fallait nous le dire franchement, hein ! », explosa Jessie, profondément agacée d'être scrutée par les deux morveuses.

Ondine fronça les sourcils.

« Oui, ils me disent aussi quelque chose. Et ce qui est encore plus bizarre, ce que lorsque cette femme m'a parlé, elle avait un accent étranger contrairement à maintenant. »

« Quoi une personne ne peux pas parler plusieurs langues, c'est ça ?! », continua Jessie alors qu'elle sentait la provocation de scandale monter à l'intérieur d'elle. « Je n'ai pas le droit de m'exercer ? C'est ça que vous êtes en train de dire ? »

James retenu sa co-équipière qui commençait à faire demi-tour et à s'avancer vers la morveuse rousse. Ils n'avaient clairement pas besoin d'une bagarre à la sortie de l'avion. Avec la chance qu'ils avaient, ils se feraient arrêter par la police dès leur entrée dans l'aéroport.

Jessie arrêta de se débattre tandis que d'autres passagers sortaient de l'appareil et passaient à côté d'eux, non sans leur jeter des regards curieux.

« Nous ne disons pas ça, madame. », répondit Aurore en levant les mains en signe d'apaisement, imité de près par son Tiplouf.

« Alors quoi ? Vous dites que nous sommes des imposteurs ?! Que – que nous sommes de retour pour vous jouez un mauvais tour ou je-sais-pas-quoi ?! », questionna-t-elle en jetant ses mains en l'air, presque hystérique.

Un silence passa pendant que tous le monde assimilait ce qu'elle venait de dire. Jessie se rendit compte de son erreur au même moment que la lumière se fit dans le cerveau des morveuses. Elle jura entre ses dents avant de se retourner et de froncer devant elle.

« Courrez ! », ordonna Jessie à ses co-équipiers en bousculant des passagers pour libérer la voie et en ignorant les exclamations des deux morveuses qui leur criaient de s'arrêter. « Ne vous retournez pas ! »

« Et nos valises ?! », s'exclama James, horrifié, alors qu'il lui emboîtait tout de même le pas, son totebag fermement serré contre son torse. « Elles sont encore dans la soute – ou peut-être prêtes à être décharger sur le tapis roulant ! »

« Oublie les valises ! On en volera des nouvelles ! », rétorqua directement Jessie par-dessus son épaule.

« T'es au courant qu'il y avait toutes nos affaires dedans, au moins ?! », argumenta-t-il.

« C'est soit nos ôffaires, soit la prison ! », répliqua Miaouss alors qu'il abandonnait sa course sur deux pattes au profil de ses quatre pattes afin d'aller plus vite. « Et môôa, mon choix est tout réfléchi ! »

« Donc notre nouveau plan de prendre encore cette compagnie pour voler les Pokémon des morveuses tombe aussi à l'eau ? », voulu-t-il savoir.

« Non mais tu crois vraiment que c'est le moment pour débriefer de ça ?! », s'offusqua le chef du trio. « Évidemment que ça tombe aussi à l'eau ! Maintenant ferme-là et grouille-toi ! Miaouss est déjà loin devant ! »