Chapitre 3 :
Je ne m'étais pas du tout attendue à ce qu'il s'adresse à moi. Du coup, j'étais déroutée. Hors de question de faire une action ! Qui sait ce qu'il aurait été capable de me demander de faire vu son état d'énèrvement ?
_ Heu... vérité, répondis-je d'une toute petite voix intimidée.
Oui, Régis pouvait m'impressionner quelques fois. Il prit un instant avant de poser sa question, toujours sans me regarder et en restant concentré sur son breuvage.
_ As-tu... des regrets ? Lâcha-t-il dans un soupir lourd de sous-entendus.
Si la question pouvait avoir un sens très large pour le public nous entourant, moi je savais exactement à quoi il faisait allusion.
Que pouvais-je bien répondre ?
Je ne pouvais pas avouer ici, devant tout le monde, que pas un jour ne s'était passé, durant cette fichue année qui venait de s'écouler, sans que je surveille mon téléphone en espérant voir son nom s'afficher.
Que pas même une demi journée ne passe sans que je ne regarde sa photo que je gardais constamment sur moi... Et pas un soir sans que je ne pleure.
Serait-il flatté, ou triste, s'il savait qu'à de nombreuses reprises, en pleine nuit, j'avais parcouru la cinquantaine de kilomètres qui me séparait de chez lui ? A attendre des heures entières devant chez lui et me privant de sommeil, sans jamais aller oser frapper. Juste pour être plus près de lui.
Serait-il ravi ou dévasté si il savait que j'étais allée assister à tous ses matchs en secret, discrètement cachée dans le public ?
_ Oui... soufflais-je, en accompagnant ma réponse d'un acquiescement triste sans oser le regarder.
Bien entendu j'avais des regrets. Mais je ne pouvais pas les expliquer, et encore moins les réparer, surtout pas après avoir été témoin de ce que j'avais vu ce soir.
Je décidai de ne pas tenir compte des regards curieux alentours, ni de tenter de croiser le sien à lui, et prenais mon tour sans faire traîner cette manche.
_ Bien, alors moi. Je choisis Flora ! Action ou vérité ?
Puis nous continuâmes à jouer un long moment dans une ambiance plus détendue et plus amusante.
L'un s'était retrouvé à chanter un rap improvisé pour sa dulcinée.
Une, avait dû avouer l'âge de son premier baiser.
Un autre avait dû effectuer une danse ridicule sur la petite table.
Encore un autre avait dû avouer le nom de sa première petite amie, sous la menace de sa femme qui avait posé la question.
Et bien d'autres actions et véritées encore ! Tout cela dans la bonne humeur et la taquinerie.
Quand l'heure fut vraiment tardive, Aurore et Paul émirent en premier le désir d'aller se reposer.
Le chalet disposait de quatres vastes chambres, alors nous décidâmes après concertation, de céder trois des chambres disponibles à chacun des trois couples, afin de leur laisser l'intimité dont ils avaient besoin.
Ainsi, les six époux nous remercièrent chaleureusement et partirent poser leur bagages dans les chambres qu'ils auraient choisi.
IL ne nous resta plus, qu'à nous huit restants, la seule possibilité de partager la dernière chambre et de co-dormir tous ensemble comme au bon vieux temps.
Quand nous arrivâmes à l'étage dans la jolie pièce à coucher et que les garçons voulurent se montrer galants en nous laissant le lit deux personnes à Iris, Séréna et moi, il y eut comme un malaise.
C'était peu dire que d'admettre que je n'avais pas très envie de partager un lit avec la petite blonde, qui avait l'air d'en avoir autant à mon propos.
Je me lançai donc dans un discours féministe à une heure et demi du matin en prétendant avec fermeté que, bien que leur geste soit plein de bonté et apprécié, les femmes n'avaient pas à faire l'objet de traitement de faveur et qu'elles pouvaient bien elles aussi se montrer délicates envers le sexe opposé. Et que personnellement, j'étais prête à laisser ma place aux garçons ou seulement aux autres filles.
Tout le monde me regarda comme si j'étais une alien. Même cet indéridable Régis. Je le vis poser son poing sur sa bouche pour s'empêcher de rire. Sans nul doute, mon plaidoyé n'avait ressemblé à rien. Pourtant, je parvins quand même à obtenir ce que je voulais. Ou plutôt, ce que je ne voulais pas.
Elles acceptèrent sans broncher de partager le lit toutes les deux ensemble.
Quand à nous autres, il ne nous resta plus qu'à gonfler des matelas que Pierre nous distribua. Et nous les dispèrsèrent un peu partout à travers la vaste pièce.
Je regrettai mon foutu discours en faveur de la lutte des femmes quand je me retrouvai à gonfler moi-même ce fichu matelas. Ce n'était pas facile, dis donc !
Mais j'en vins à bout et posai mon lit au sol, au pied du grand lit. Il était difficile pour l'instant de savoir qui s'était placé ''où'', je n'y avais vraiment pas prêté attention, et chacun était encore un peu dispercé. J'attrapai le lot de couverture mit à ma disposition ainsi que l'oreiller et les mettai en place sur ma couche improvisée.
Le labeur fini, j'attendis, assise sur mon matelas, de pouvoir prendre mon tour dans la salle de bain.
En attendant, Iris, Régis et Pierre attendaient déjà leur tour dans le couloir, me semblait-il, car Séréna occupait les lieux.
Sacha, lui, cherchait frénétiquement quelque chosedans son bagage pour Pikachu qui râlait à côté de lui.
Rachid, assis sur le bord du lit avec Jacky, discutait avec lui en observant quelques croquis de ce dernier qui était devenu un grand observateur de renommé.
Intriguée, je me levai de ma place et vint m'asseoir près de Jacky, moi aussi. J'avais envie d'observer ses croquis, s'il le voulait bien.
Ce fut avec plaisir qu'il partagea avec moi ses dernières observations. Ses traits précis, impeccables, représentaient des Pokémon dont je n'avais que vaguement entendu parler.
Ils représentaient aussi des paysages époustouflants, ou encore des personnes dans des situations de la vie courante.
Jacky disait que d'observer la nature et les gens était aussi important que d'observer les Pokémon puisqu'on apprenait énormément les uns des autres et que d'une certaine façon, énormément de choses étaient liées.
Il parlait de son métier avec une telle passion qu'il était difficile de l'imaginer faire toute autre choses dans la vie. J'admirais les gens passionnés, ils dégageaient quelque chose de spécial.
_ C'est magnifique Jacky ! Tu observes des choses passionnantes ! Lui dis-je, sincère.
_ Merci Ondine, tu as raison, c'est passionnant. Je n'échangerai de métier pour rien au monde, dit-il.
_ Et tu as raison, souris-je. Tu es très doué dans ton domaine, et tu aimes cela, ça se voit.
Il fut rapidement mon tour d'aller à la salle de bains.
Quand je revins de ma toilette, les lumières étaient éteintes dans la chambre et on entendait que le chuchottis des filles qui parlaient encore un peu.
Je ne laissai pas à mes yeux le temps de s'habituer à l'obscurité et avançai à tâtons jusqu'à mon lit, peu difficile à trouver puisqu'il était juste au pied du grand lit. Je le rejoignis sans trop d' encombres.
A présent, il était encore plus difficile de pouvoir situer les autres à travers la pièce. Cela dit, ça n'avait pas une grande importance.
Comme tous les autres, je tombais de sommeil et ne demandais qu'à dormir. Je m'allongeais et, malgré les chuchottements qui virevoletaient encore dans la pièce, je fermai les yeux et m'endormis.
Une boule de neige m'arriva en pleine figure et je me réveillai en sursaut.
Tout était sombre et calme autour de moi. Pfouu ! Ce n'était qu'un rêve ! Sacha avait réussi à m'enquiquiner en dormant.
J'avais songé à nos nombreuse batailles de neige de l'époque.
J'attrapai ma montre que j'avais normalement glissé sous mon oreiller et observai l'heure dessus grace à une petite lumière qu'elle émettait sur le cadran. Il était six heures. Bon sang ! J'avais dormi à peine quatre heures. Je décidais de reposer la tête sur l'oreiller et me rendormir deux petites heures.
Je fermai les yeux en revoyant défiler des images de mon rêve, tout fraîchement abandonné.
Soudain, je sentis un frottement contre mon bras. Je poussai un petit cri, horrifiée. Il faisait noir et je n'avais aucune idée de ce que cela pouvait être.
Le frottement, étonnament soyeux, bougea pour frôler tout le long de mon bras. Je repoussais un petit gémissement, pétrifiée.
Puis je parvins a distinguer deux pointes poilues sortir de sous la couverture, suivie d'une bouille toute ronde aux joues d'un rouge si vif que je les distinguai dans le noir. Bon sang ! C'était Pikachu qui s'était faufilé dans mon lit pendant mon sommeil. Je fus rassurée et poussai un gros soupir de soulagement.
Je le pris contre moi en chuchottant, le cœur battant : « oh tu m'as fait peur ».
_ Pika, murmura-t-il lui aussi pour me dire à sa façon qu'il s'excusait de m'avoir fait effrayé.
Je l'ensserrai comme une peluche et j'entendis une voix inquiète, à proximité :
_ Tout va bien ? Ondine, c'est toi ?
Même murmurante, je reconnaissais sa voix de ténor, si douce à mes oreilles. Et elle m'était encore plus délicieuse à entendre alors que j'étais à moitié enveloppée par les limbes du sommeil.
_ Oui, tout va bien, merci.
Il ne répondit rien, je n'entendis qu'un froissement de tissu, puis plus rien.
Il n'était qu'à quelques pas de moi, et le savoir si proche me réchauffait le cœur.. Je savourais sa proximité, osant me le permettre.
Combien de fois dans le passé avais-je espéré m'endormir avec la certitude de le voir à mon réveil ? Et à quel point avais-je recherché sa proximité, toute cette année, en sachant qu'elle était impossible à trouver !
Alors le savoir là, près de moi, même en colère, m'emplissait d'une joie immense, même si elle devait être éphémère. Je m'ennivrai de la simple idée de sa proximité, et la demi inconscience m'aidait à transcender ce sentiment.
Je serrai Pikachu contre moi et me rendormis, heureuse et sereine.
Ce fut vers huit heure et demi du matin que j'ouvris les yeux. Une douce lueur de jour filtrait à travers les épais rideaux tirés. Je vis Pierre, un peu plus loin dans la pièce, assis sur son matelas, en train de se réveiller doucement, lui aussi. Pikachu était couché au creu de mon épaule et dormait toujours paisiblement.
A présent que j'y voyais un peu clair dans la pièce, mon premier réflexe fut de regarder autour de moi, certes difficilement, à cause de mes yeux mi-clos.
Pas loin sur ma gauche, il y avait Jacky. Un peu plus loin à mon pied, presque vers la porte d'entrée, il y avait Rachid. Dans le renfoncement, assez spacieux tout de même, qui se trouvait à gauche du grand lit, il y avait Pierre. Je me dévissai à moitié la tête pour regarder derrière moi, d'où venait la lumière du jour. Un tout petit peu plus loin à ma tête, il y avait Régis, que j'avais en effet entendu très proche durant cette nuit, je m'en souvins.
Inutile d'escompter réussir à effacer le sourire découlant de ce souvenir.
Je me demandais bien où était Sacha, certainement de l'autre côté de ce lit. Là où je ne pouvais pas voir. Je m'étirai d'un bras, évitant de réveiller le petit Pokémon qui dormait sur l'autre.
Pierre remarqua que je bougeais et tourna la tête vers moi.
_ Ah, tu es réveillée, toi aussi ? Demanda-t-il en chuchottant. Le silence étant total, je n'avais pas de mal à comprendre ses murmures, même à quelques mètres.
_ Oui, répondis-je sur le même ton que lui. Tu as bien dormi ?
_ Très bien, et toi ? ''madame indépendante'' qui n'a pas besoin d'un lit confortable, rigola-t-il.
Je pouffai dans ma main, aussi hilare que gênée.
_ Très bien aussi, merci, dis-je en riant.
_ C'est toi qui a crié, cette nuit ?
_ Mince, tu m'as entendu toi aussi ? Je suis désolée, c'est Pikachu qui m'a fait peur. Je ne savais pas qu'il m'avait rejointe.
_ C'est adorable. Enfin, pas que tu aies eu peur, hein ! Je fais allusion à Pikachu.
_ Je trouve aussi, dis-je en regardant le petit Pokémon endormi comme je regarderai un bébé. Désolé que tu m'aies entendu.
_ Ce n'est rien, je t'ai entendu dire que ça allait, donc je me suis rendormi aussitôt.
_ En tout cas, tout ce décor à un effet indiscutable sur mon état d'esprit. Cette nuit j'ai rêvé de cette bataille de boules de neige qu'on avait faite au Bourg Palett, un jour, devant le labo du professeur Chen. Tu te souviens ?
_ Oui ! Qu'on s'était amusés !
_ On a fâché le Tauros du professeur qui nous a coursé, à cause de Sacha qui avait raté sa cible et lui avait envoyé une boule en plein sur la tête !
_ C'est vrai ! Sacha ne sait vraiment pas viser, rit-il.
_ Hey ! Je vous entend, grogna la voix de celui-ci, qui apparemment était tout juste réveillé.
Le son de sa voix provenait bien de là où j'avais supposé qu'il était couché.
Machinalement, je retirai doucement mon bras de sous Pikachu pour me retourner sur le ventre et m'appuyer sur mes bras.
Quelle ne fut ma -très agréable- surprise ! Quand je vis Régis, réveillé, visage posé sur ses bras croisés et qui me regardait, sans un mot.... Qu'il était beau ! J'en eus le souffle coupé.
Quand mon regard croisa le sien, il me sourit. D'un de ses si magnifiques sourires qui me faisait mourir d'amour pour lui.
_ Vous avez bien dormi ? Demanda la voix de Sacha qui venait de l'autre côté du lit.
Pierre lui répondit mais moi, je l'avais à peine entendu, noyée dans les yeux de celui avec qui j'aurai bien aimé me réveiller. Lui et moi nous contentions de nous regarder, en souriant, nous suffisant amplement l'un à l'autre pour rendre ce réveil magique.
C'était comme si, l'espace de cet instant, sa colère était loin, presque oubliée. Je me sentais apaisée, heureuse. Comment ne pas être touchée par ces tendres prunelles, dans lesquelles je me perdais comme dans la profonde verdure d'une forêt.
Ses iris, légèrement auréolées d'une touche dorée, étaient une invitation à évoluer dans ces magnifiques sous bois vers la lumière éclatante du soleil. J'y courais, m'y enfonçais sans aucune peur de ne pas retrouver le chemin pour en sortir. Y resterais-je prisonnière pour toujours, que j'accepterai ma condition, volontiers.
_ Ondiiine ? Interpella la voix de Sacha ? Tu as bien dormi ?
Je soupirais, brutalement arrachée à ma contemplation et aux sentiments qui l'accompagnait. Je lui en voulu presque de percer ma bulle. Et à en juger par la mine de Régis, je n'étais pas seule à éprouver ce sentiment.
_ Oui, répondis-je plus sèchement que je l'aurai voulu.
Pas grave, je mettrai cela sur le compte de ma voix du matin, si on me le demandait.
Là, pour la première fois depuis plus d'un an, je vis un vrai sourire illuminer le visage de Régis en face de moi. Son bonheur avait un effet direct sur le mien. Quand je le voyais sourire, j'étais heureuse.
Pikachu se réveilla, s'étirant doucement à côté de moi. Je le sentis, mais ne le regardai pas. Je ne pouvais pas détacher mes yeux de ce garçon qui faisait palpiter le sang dans mes veines dés le matin.
_ Pikachu ? Appela soudain Sacha, un brin inquiet.
_ Pikaa … répondit le petit Pokémon tout en s'étirant encore.
Régis détacha ses yeux des miens pour regarder Pikachu. Je vis son sourire se fâner un peu. Je savais qu'il aimait Pikachu, du moins, il n'avait rien contre. Mais je me dis qu'il devait être dérangé de le voir là, à côté de moi, étant donné qu'il était le fidèle compagnon de Sacha ''à la vie à la mort''. Peut-être que de voir le Pokémon fusionnel de son rival si attaché à moi, lui déplaisait.
Mon impression était peut-être la bonne, me dis-je alors tandis qu'il se recoucha sur le dos et s'étira à son tour, rompant définitivement notre moment.
_ Heum, il était avec moi, répondis-je enfin à l'attention de Sacha.
_ Oh, il ne t'a pas dérangé ? Demanda Sacha qui s'était relevé et qui était apparu dans mon champ de vision.
_ Bien sûr que non. J'adore Pikachu, dis-je en serrant une fois de plus la petite boule de poil dans mes bras.
Il frotta son petit nez contre moi et sortit de mon lit pour rejoindre son maître.
Je tournai la tête en regardant alentours. Jacky était réveillé apparemment, et je ne l'avais pas remarqué. C'était sans doute dans son tempérament d'observateur que de savoir se faire discret.
Rachid et les filles ne tardèrent pas à se réveiller eux aussi.
Nous décidâmes d'une organisation juste, où nous irions à la salle de bain à peu près dans le même ordre que celui dans lequel nous nous étions réveillés.
Pierre prit donc la place en premier, refusant de me la céder puisque j'étais une ''femme indépendante » rigola-t-il une fois de plus en me resservant mon discours nocturne hypocrite.
D'autres le suivirent dans sa rigolade, à mes dépens, et je grognai à leur encontre.
Malgré tout, une belle journée s'annonçait !
_ Bonjour, Régis, tu as passé une bonne nuit ? Entendis-je miauler Séréna qui ne perdait décidément pas le nord malgré le petit matin.
Peut-être pas si terrible que cela, la journée, finalement...